L'identification des impacts négatifs et des menaces pesant sur les VME (entre autres les hauts-fonds, les cheminées hydrothermales, les coraux d'eaux froides et les champs d'éponges) a donné lieu à une demande d'action à l'échelle mondiale pour réglementer la pêche hauturière de fond. En réponse, la CCAMLR a élaboré des méthodes d'identification des VME et des protocoles de rencontre pour les navires de pêche. Elle a mis en place une série de Mesures de conservation pour assurer la protection des VME.
Les impacts négatifs de la pêche de fond sur les écosystèmes marins sont largement reconnus comme un problème qui survient dans les pêcheries nationales et, de plus en plus fréquemment, dans les pêcheries menées dans des zones situées au-delà des juridictions nationales. La préoccupation mondiale quant aux effets négatifs des pêcheries de fond a fait inscrire la question à l'ordre du jour du Processus consultatif officieux ouvert à tous sur les océans et le droit de la mer des Nations Unies (UNICPOLOS).
Par ailleurs, bien des recommandations de l'UNICPOLOS ont été approuvées par l'Assemblée générale des Nations Unies (AGNU) dans une série de résolutions visant à faire face aux impacts des activités de pêche de fond. En particulier, la résolution AGNU 61/105 demande aux organisations et accords régionaux de gestion des pêches (ORGP/ARGP) de fermer certains secteurs à la pêche de fond jusqu'à ce que des mesures appropriées aient été mises en place pour éviter tout impact négatif significatif sur les écosystèmes marins vulnérables (VME).
L'AGNU a donné des exemples de VME représentant des écosystèmes benthiques associés aux hauts-fonds, aux sources hydrothermales, aux fosses océaniques et aux canyons sous-marins, ainsi qu'aux dorsales océaniques. Dans bien des cas, les taux de croissance lents des taxons associés à ces écosystèmes les rendent particulièrement vulnérables aux impacts négatifs des engins de pêche. Il est donc important de noter que le paragraphe 83 de la résolution AGNU 61/105 demande aux organisations et accords « ayant compétence pour réglementer la pêche de fond d’adopter et de mettre en œuvre [des mesures], conformément au principe de précaution, à l’approche écosystémique et au droit international, pour leurs zones de compétence respective, à titre prioritaire et dans tous les cas avant le 31 décembre 2008 ».
Gestion des pêches et écosystèmes marins vulnérables en Antarctique
Par rapport à bien des régions océaniques du globe dans lesquelles se déroule la pêche de fond, il n'existe que très peu de données sur la topographie du fond dominante de l'océan Austral ou sur les écosystèmes marins benthiques qui y sont associés. Cela est illustré par la proportion de nouvelles espèces découvertes lors de recherches récentes axées sur l'étude de la faune benthique marine de la région. De plus, en Antarctique, où les taux de croissance des taxons benthiques sont généralement plus lents que dans les régions tempérées, les impacts des engins de pêche sur les taxons vulnérables risquent d'être amplifiés en raison de la lenteur à laquelle ces organismes à récupèrent.
La CCAMLR a adopté une série de mesures (voir tableau 1) qui limitent les pêcheries de fond en fermant certains secteurs à la pêche, ainsi que d'autres mesures établies spécifiquement pour protéger les communautés benthiques. Par exemple, la pêche aux poissons est interdite autour de la péninsule antarctique et des îles Orcades du Sud pour protéger des stocks de poissons qui ont été surexploités avant l'établissement de la CCAMLR ; la pêche de crabes au casier est toutefois autorisée à la suite d'un programme de recherche scientifique.
Le chalutage de fond est interdit dans tous les secteurs de haute mer de la zone de la Convention et une interdiction totale de l'usage des filets maillants est en place. Les seules pêches de haute mer autorisées actuellement par la CCAMLR sont le chalutage pélagique du krill, la pêche à la palangre démersale et la pêche au casier des crabes et des poissons. En ce qui concerne ces derniers engins, afin de protéger les systèmes benthiques du plateau, la pêche de fond est interdite dans des eaux de moins de 550 m de profondeur tout autour du continent antarctique.
Tableau 1 : Références aux paragraphes des rapports des réunions de la CCAMLR et aux mesures de conservation correspondantes montrant l'évolution des discussions et des mesures prises par la CCAMLR en conséquence de la résolution 61/105 de l'AGNU. (n) = nouvelle mesure de conservation, (a) = mesure de conservation amendée.
Rapport | 2006 | 2007 | 2008 | 2009 |
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WG-SAM (statistiques, évaluations et modélisation) (SC-CAMLR, annexe 6) | 4.7–4.19 | |||
WG-EMM (contrôle et gestion de l'écosystème) (SC-CAMLR, annexe 4) | 3.21–3.44 | 5.1–5.14 | ||
WG-FSA (évaluation des stocks de poissons) (SC-CAMLR, annexe 4) | 14.1–14/50 | 10.3–10.109 | 10.1–10.51 | |
Comité scientifique | 4.214–4.126 | 4.159–4.171 | 4.207–4.284 | 4.238–4.258 |
Comité permanent sur l'application et l'observation de la réglementation (CCAMLR, annexe 5) | 2.36–2.49 | |||
Commission | 11.27–11.38, 12.18, 12.28 | 5.9–5.20, 13.40–13.46 | 5.4–5.30, 13.11–13.12 | 5.3–5.1, 8.26–8.3.5, 12.17–12.23 |
Mesures de conservation |
21-01 (a) 21-02 (a) 22-05 (n) |
22-06 (n) |
22-05 (a) 22-06 (a) 22-07 (n) 41-04 (a) 41-06 (a) 41-07 (a) 41-08 (a) 41-09 (a) 41-10 (a) |
22-06 (a) 22-07 (a) 22-08 |
Observation de VME potentiels
Alors que les engins de pêche tels que les palangres ou les casiers ne sont pas conçus pour échantillonner les organismes benthiques, les prises secondaires de taxons indicateurs de VME fournissent des informations utiles sur la répartition géographique des VME. Toutefois, l'absence de tels taxons dans la capture ne veut pas forcément qu'il n'y a pas de VME dans le secteur pêché. L'approche adoptée par la CCAMLR a donc été d'équilibrer l'acquisition d'informations sur les VME avec la nécessité d'appliquer des mesures de précaution visant à éviter tout impact négatif significatif sur les VME.
La MC 22-07 prévoit les procédures que les navires doivent suivre pour contrôler et déclarer les observations de VME potentiels lors de la pêche de fond. Les navires de pêche sont tenus de recueillir et déclarer des données sur les captures de certains « taxons indicateurs de VME » décrits dans le Guide CCAMLR de classification des taxons des VME (VME Taxa Classification Guide (2.34 Mo)).
Le nombre d'unités indicatrices de VME récupérées sur chaque segment de ligne des palangres de fond (ou des filières de casiers) est déclaré au secrétariat de la CCAMLR. Les segments de ligne prenant cinq unités indicatrices de VME ou davantage sont déclarés immédiatement et tout secteur situé dans un rayon de 1 mille nautique du point central du segment de ligne sur lequel au minimum 10 unités indicatrices de VME ont été obtenues constitue une zone à risque. Les zones à risque sont immédiatement fermées à la pêche de fond et restent fermées tant que le Comité scientifique ne les aura pas examinées et que la Commission n'aura pas pris de mesures de gestion. La recherche scientifique approuvée par le Comité scientifique est autorisée dans les zones à risque. Des rectangles à échelle précise de VME (0,5° latitude sur 1,0° longitude) sont également désignés dans des secteurs faisant fréquemment l'objet de notifications d'indicateurs de VME.
Les zones risquant de contenir des VME et les rectangles à échelle précise correspondants sont enregistrés dans le Registre CCAMLR des VME (58.24 Ko).
Sur le même sujet
Reid, K. 2011. Conserving Antarctica from the Bottom Up: Implementing UN General Assembly Resolution 61/105 in the Commission for the Conservation of Antarctic Marine Living Resources (CCAMLR). Ocean Yearbook, 25: 131–139.